samedi 22 février 2014

Le Sens du Magal de Porokhane

 
La communauté musulmane sénégalaise, plus particulièrement mouride, va célébrer au jour de ce Samedi 1er Mars 2014 le Magal (terme wolof signifiant : commémoration) de Porokhane qui est une localité se trouvant dans la région sénégalaise de Kaolack. Cette commémoration a été instituée par le quatrième fils de Cheikh Ahmadou Bamba, Cheikh Mouhammadou Bachir Mbacké (1895-1966). Elle est fêtée annuellement, et rend hommage à l’une des femmes les plus saintes que l’histoire n’ait jamais connue, et s’agissant de Sokhna Diarra Bousso (1833-1866), la mère de Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké.
 
La mère de Khadim Rassoul (le Serviteur Privilégié du Prophète PSL), de son vrai nom Mariama Bousso, est issue d’une famille de grande renommée musulmane. De par son dévouement légendaire à son époux Sérigne Mame Mor Anta Sally Mbacké, à l’entretien multiforme et exemplaire de son foyer, mais aussi de sa sainteté religieuse inégalée, elle finira par être appelée Diâriyatoul Lâhi, la voisine d’Allah. Malgré l’immensité intemporelle de son œuvre qui lui a permis d’être la procréatrice du plus grand Saint de l’histoire, Mame Diarra Bousso comme elle est communément appelée, n’a vécu pourtant que trente trois (33) années, égales à celles que le Prophète Jésus Christ vivra sur terre pour répandre le message de Dieu. Sokhna Mame Diarra Bousso vécut alors ces mêmes années, et aura miraculeusement le temps de laisser aux femmes du monde entier un héritage culturel, qui servirait à toutes celles qui voudront marcher sur ses mêmes marques, de connaitre le bonheur éternel dans les deux mondes (le bas monde et l’au-delà). 

Mame Diarra Bousso est aujourd’hui considérée comme l’icône même de la sainte femme musulmane, qui se devait par essence d’être soumise à son époux, après d’être soucieuse de l’éducation stricte et islamique de sa progéniture, mais aussi être très perfectionniste dans les devoirs religieux, jusqu’à devenir un parfait exemple de sa descendance. Un devoir que cette femme exemplaire réussira avec un plein succès.

L’exemplarité de sa personnalité fait qu’aujourd’hui qu’on ne peut presque guère entrer dans un cercle mouride, sans voir un de ses membres qui porte son nom. L’établissement d’enseignement islamique de renommée qui se trouve dans cette localité de Porokhane, qui est en même temps un internat, en est une très belle preuve, car la formation qui y est dispensée est gratuite, et le seul critère de sélection pour y accéder, est de porter tout simplement le nom de Sokhna Diarra Bousso. Et depuis son ouverture, les homonymes de la sainte femme qui y sont formées se comptent par centaines voir des milliers, et ses portes d’accès sont de tout temps sollicitées par des candidates venant de toutes les contrées.
Le sens de cette commémoration serait donc de permettre aux femmes de mieux s’imprégner des qualités de cette femme pieuse, mais aussi d’imiter le plus parfaitement possible ses nobles caractères. 
Ceux qui seront présents dans cette localité de Porokhane où Sokhna Diarra Bousso passera une bonne partie de sa vie avec le jeune prodigieux Cheikh Ahmadou Bamba, auront la chance de pouvoir visiter le puits où la femme pieuse venait puiser de l’eau pour s’affairer aux travaux domestiques, et au breuvage des élèves de l’école coranique de son époux. Ils auront aussi l’opportunité de visiter son mausolée, et de vivre pendant deux ou trois jours environ, d’intenses moments de dévotion religieuse accompagnée par des récitations du coran, de la déclamation de khassida (poème du Maître Cheikh Ahmadou Bamba), de zikr (litanie religieuse), et du récit historique de la vie et de l’œuvre de la sainte femme. Et à ce propos, l’un des faits historiques qui marqueront à jamais la sensibilité religieuse de tous, serait sans doute ce récit mémorable :
« Pendant une nuit, Sérigne Mame Mor Anta Sally Mbacké appela Sokhna Diarra Bousso pour lui tenir une clôture de pailles qu’il devait réparer. Sérigne Mame Mor dût alors entrer dans sa case, qu’une pluie s’abattit vite, accompagnée de vents. Sérigne Mame Mor eut alors le reflexe de rester dans sa case pour attendre que la pluie cesse. La pluie ne cessera alors de sitôt, et Sérigne Mame Mor ne sortira de sa case qu’à l’aube de cette même nuit.

En franchissant le seuil de sa porte dans l’aube, Sérigne Mame Mor fut surpris de voir Sokhna Diarra Bousso qui tenait encore la même clôture de paille, mouillée de la tête au pied.

A la question de Sérigne Mame Mor de savoir ce qu’elle faisait encore dans ce lieu, la sainte femme lui répondit :
« Oh mon mari, vous ne m’aviez pas donné l’ordre de laisser cette clôture de paille »… (La narration est parfois différente de cette version, toutefois ce qui est important c’est de retenir le fait que la sainte femme s’était sacrifiée en restant dehors dans la forte pluie pendant toute une nuit, rien que pour œuvrer dans le droit chemin)
C’est ce genre d’actes que la sainte femme posait alors tout au long de sa courte vie, très riche en épreuves de grands enseignements. Ce qui poussera au poète de lui adresser ces éloges qui sonnent comme l’hymne des activités quotidiennes de la pieuse femme à ses temps :
« Mësta julli te jáppul,
Mësta julli te wérdul,
Doora xéy sángam tuubël,
Daaldi wër kërëm buubël ». 
« Elle n’a jamais prié sans avoir fait ses ablutions,
Elle n’a jamais prié sans faire après ses litanies religieuses,
Après elle débutait sa journée en demandant le pardon à son homme,
Ensuite elle faisait le tour de sa demeure pour l’entretenir ». 

Ces vers sonnent d’ailleurs comme l’hymne de toute femme soucieuse de se prescrire dans la bonne voie, pour en cueillir ainsi le bonheur éternel. Sokhna Diarra Bousso aura donc marqué son existence, et elle continue de le faire par ses faits et actes qui ont jalonné le temps, et sa plus grande redevance serait aujourd’hui que toutes les femmes l’imitent dans leur comportement de tous les jours. Pour rappel, elle est la seule femme au monde a bénéficié d’une commémoration faite sous un cachet religieux. Raison de plus de mieux connaitre la dimension socioreligieuse de Sokhna Mariama Bousso, et de prendre comme repère sa vie, et son œuvre. 

Moustapha Dramé
Alali Serigne Touba / Esclave de Bamba

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire