Le Serviteur Privilégié du Prophète fut appelé, pour la seconde fois
de sa vie, à quitter les siens lorsqu'il fut contraint de quitter sa
demeure pour la Mauritanie le 14 du mois de "Gamou" (Rabi'ul-Awwal)
1321. Cette date, signe du destin, correspondra très exactement à celle
du Conseil Privé de Saint-Louis qui avait décidé de sa première
déportation au Gabon... Autre détail caractéristique est aussi que le
jour de 14 du mois de "Gamou" représente le surlendemain de celui de
l'anniversaire de la Naissance du Prophète (PSL) mais aussi de celui de
son Hégire vers Médine (qui ont tous les deux eu lieu un jour de 12 du
mois de "Gamou" )...
Ainsi Cheikh Ahmadou BAMBA eut-il à rejoindre le
Cheikh Sidya à Saout-el-Ma après avoir confié à son frère et disciple
Mame Thierno Birâhim la charge de superviser l'enseignement des mourides
et à Mame Cheikh Anta la gestion de leurs travaux.Une fois en pays
maure, le Cheikh sera appelé à accompagner la famille de Cheikh Sidya
dans nombre de ses déplacements vers les points d'eau tels Babagouy,
Al-Idiyya, Tanamire ou Sarsar.
C'est notamment au cours de leur séjour à
Sarsara que l'accès au Cheikh fut autorisé par les colons et que purent
se déverser des vagues de visiteurs venues du Sénégal
en pèlerinage, mais aussi des tribus bédouines dont les Bani Daymân
restaient sans doute la plus réputée pour sa piété ancestrale,
l'excellence de ses Ulémas dont le fameux Muhammad al-Yaddali n'est
certes pas le moins éminent.
L'indescriptible impression occasionnée par
la Lumière et les Dons Incommensurables du Serviteur du Prophète que ces
éminences ne tardèrent point à déceler après due mise à l'épreuve
firent qu'ils finirent par lui faire unanimement allégeance, suivies en
cela par d'autres tribus bédouines; ce qui préfigurait, en quelque
sorte, une révolution psychologiquetant il est vrai que les secrets de
la religion étaient, chez les indigènes Noirs, réputés être l'apanage
des Maures. Complexe d'infériorité dont le Cheikh fut l'un des rares à
s'être affranchi et, ce, très tôt durant sa jeunesse, à travers
notamment son préambule dans Les Itinéraires du Paradis: "[Ô Lecteur!]
que mon appartenance à la race noire ne t'incite point à ne pas accorder
le crédit dû à cet ouvrage / L'homme le plus honorable auprès de DIEU
est sans conteste celui qui Le craint le plus / La couleur noire de la
peau ne saurait aucunement être un indice de sottise ou
d'inintelligence..."
Le Cheikh rendra, par ailleurs, plus tard grâce à
DIEU de la faveur qu'IL lui fit à travers l'allégeance des tribus
bédouines à travers ce poème:
" Mes louanges et remerciements
sont consacrés à Celui
Dont j'étais devenu parfaitement satisfait à
Sarsara,
Tout satisfait de lui, je le loue
Depuis qu'il m'a amené des
partisans issus des Bani Daymâni.
J'étais tout dévoué à Dieu lors de mon
séjour chez ces généreux
Que j'ai quitté après avoir reçu de nombreux
visiteurs.
Ceux qui allèrent à Sarsara dans l'intention de me rendre
visite
Sont définitivement déchargés de leurs péchés."
Durant cette période, les mourides eurent à effectuer le
périple à pied ou par tout autre moyen dans des conditions de voyage que
seule la foi pouvait justifier.Devant cette nouvelle affluence les
autorités coloniales pensèrent un moment l'éloigner en 1906 à
Fort-Coppolani, un peu plus au nord de la Mauritanie, mais consentirent
finalement à autoriser Cheikh Ahmadou BAMBA, sur sa demande, à revenir
au Sénégal, en juin 1907.
Mais pour parer aux craintes de débordement que
leur inspirait ce second retour au pays, les autorités décidèrent de
limiter la liberté d'action du Cheikh en le détenant en résidence
surveillée dans la localité de Thiéyène, située dans la province du
Jolof, où un terrain de 4 km² lui fut affecté. Des mesures draconiennes
furent par la suite prises pour contrôler et limiter le flot de
visiteurs qui quotidiennement se déversait chez le Saint Homme avec des
quantités impressionnantes de dons de toutes sortes.
Cheikh Ahmadou BAMBA
dut ainsi résider pendant prés de quatre ans et demi à Thiéyène avant
d'être autorisé à rentrer définitivement à Diourbel sur requête du
Commandant de Cercle dont les profondes motivations s'avérèrent par la
suite loin d'être de toute honorabilité...
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