Jadis brousse sombre habitée par des animaux sauvages avides de repas
humains, Touba est devenue au 21ème siècle une cité moderne jalonnée
d’immeubles et particulièrement bien dessinée. En l’espace de 125 ans,
la cité a connu une fulgurante évolution.
Une révolution,
plus qu’une évolution, devrait-on dire ! Malgré cela, Touba garde
toujours jalousement quelques-uns de ses traits qui confèrent à son
identité un caractère singulier. Ville religieuse et surtout très
traditionnelle, le village de Bamba, riche de sa mosquée à la belle
architecture et de ses palais pittoresques, continue à laisser rouler
ses 16 000 charrettes et à boire de l’huile puisée des puits. Ses
quartiers sont appelés « darou », ses autorités « serigne », son maitre «
Khalife » et ses habitants « talibés ».
A la découverte d’une agglomération fascinante.
Touba
est la seule cité au monde dont l’ensemble des quartiers sont appelés «
darou » (maisons en arabe). Derrière ces darous, il y est , toujours
adjoint des noms arabes du genre « salam » qui veut dire paix , Moukhty,
qui signifie donateur . Ces noms ont été pour la plupart désignés par
Serigne Touba, lui-même. Le premier quartier à voir le jour est celui
qui a été confié à Mame Cheikh Anta Mbacké .
Darou Salam… la cité de la paix …
Les Darous
«
J'ai reçu de mon Seigneur l'ordre de mener les hommes vers Dieu, le
très haut. Ceux qui veulent prendre cette voie n'ont qu'à me suivre.
Quant aux autres qui ne désirent que l'instruction, le pays dispose
d'assez de lettrés. Allez auprès de ceux que vous voulez ! ». Cette
déclaration marque la création du mouridisme .Le premier acte posé par
Serigne Touba sera de s’isoler. C’est ainsi qu’il fera défricher une
zone jamais habitée par l’homme : Darou Salam.
Darou Salam
fut fondée entre 1884 et 1885 car Touba ne sera découverte qu’en 1886,
année de la disparition de Lat-Dior à Derkhlé. Darou Salam, cité de la
paix, était, en fait, une cité de retraire spirituelle pour Cheikh
Ahmadou Bamba. Des historiens nous enseignent que c’est Mame Cheikh Ibra
Fall qui s’était chargé de chasser les animaux féroces qui inondaient
la localité et qui avait déterré les arbres encombrants. Aujourd’hui,
cette cité, presque reliée à Mbacké par la poussée exponentielle des
maisons, est devenue une ville moderne avec des bâtiments en dur, de
l’électricité, une grande mosquée récemment rénovée par l’homme
d’affaires Cheikh Amar, des routes bitumées, un poste de santé, etc…
Darou Salam, c’est aujourd’hui la cité de Serigne Ass Guédé.
Une
bretelle de moins de 2 Kilomètres à partir de Mbacké vers l’Est mène à
la cité bénite de Mame Cheikh Anta… le premier milliardaire mouride.
Ici, le décor a beaucoup évolué depuis une décennie. Des maisons en
dur, une belle mosquée en dur, des cimetières juste à côté. C’est de
Darou Salam que Serigne Touba est parti pour Ndame. Le Cheikh devait
alors créer Darou Marnane et Touba (dont Darou Khoudoss peut être
considérée comme la capitale). Suivront ensuite Darou Alimoul Khabir,
Darou Manane et Darou Khoudoss.
Plus connu sous le nom de
Ndame, Darou Alimoul Khabir (cité du savoir caché) a été confiée par
Serigne Touba à Serigne Ndame Abdou Rahmane Lô. Déjà en 1987, la cité ne
comptait qu’une seule maison, trois logements pour fonctionnaires de
l’Etat, les locaux de l’arrondissement. Aujourd’hui, la localité est
surpeuplée, les routes bitumées et jalonnées de stations d’essence, de
banques et de grands magasins, un somptueux bâtiment qui sert de locaux
pour services aux autorités administratives de l’arrondissement .Juste
derrière, il y a des cimetières qui appartiennent à la grande famille de
Mame Thierno Birahim. Ndame est l’étape qui vit Serigne Touba verser,
intégralement, dans l’enseignement de la théologie. On devait lui coller
le surnom de « l’Imam des Lettrés ». Sa progression allait le mener « à
la terre promise » : Touba.
L’histoire raconte qu’il avait
posé ses pieds dans l’actuel Darou Khoudoss. Cette localité est
aujourd’hui devenue le fief de son fils aîné Serigne Mouhamadou
Moustapha Mbacké. Darou Khoudoss loge « Beyti » qui abrite une bonne
partie du patrimoine matériel du Cheikh. Ici on peut y trouver les
sandales du marabout, ses valises dont celle que Mbakhane avait trouée,
la chambre des djinns etc…
Jadis forêt classée, jamais
habitée par l’homme, Darou Khoudoss fut débroussaillée par des talibés
du Cheikh qui affrontèrent des animaux féroces. Aujourd’hui, elle abrite
l’une des grandes mosquées d’Afrique de l’Ouest inaugurée le 7 juin
1963. Darou Manane, non loin de là, fut laissée entre les mains de Mame
Thierno Birahim qui héritait ainsi d’un second quartier général après
Darou Moukhty .
Darou Moukhty, justement ! La cité du
Donateur…. Ne jamais dire Darou Mousty mais Darou Moukhty comme veulent
entendre Serigne Bass Abdou Khaoudoss et ses frères. Ce fut sur
recommandation de Serigne Touba faite par lettre interposée donnée à
Serigne Amsatou Diakhaté que Mame Thierno Birahim Mbacké devait créer
en 1911 la cité de Darou Moukhty. L’homme fut un riche agriculteur qui
aimait donner de ses avoirs financiers pour le salut de la religion
Islamique. Administrativement dénommée Darou Mousty, Darou était un
vague espace. Aujourd’hui, elle est devenue une ville développée grâce
aux bras de ses fils émigrés.
Politiquement, la cité est
aussi un enjeu de taille. On y compte des établissements scolaires,
médicales, une gendarmerie etc... Elle est, officiellement, la deuxième
capitale du mouridisme après Touba. Elle a fêté son centenaire en 2012.
En l’espace d’un siècle, elle est devenue une ville moderne mais,
profondément, religieuse.
Elle abrite un magal annuel marquant
les retrouvailles de Mame Thierno et de Serigne Touba commémorant leur
première rencontre lors du retour d’exil de ce dernier. La ville est
dotée d'une grande mosquée dont l’architecture demeure encore rarissime
dans le pays et dans toute l’Afrique occidentale.
Darou Karim et Darou Rahmane
Elles
sont un peu excentrées par rapport à Touba-Mosquée. Située à l’est,
Darou Karim doit son nom au magal du Laylatul Khadr célébré tous les ans
par les petits-fils de Serigne Massamba Mbacké. Daarou Rahman, elle
aussi fondée sous le Ndigel de Serigne Touba est entre les mains de la
grande famille de Serigne Abdou Mbacké Borom Deurbi. Ces « Darous »
comme les autres ont connu une progression structurelle fascinante.
Touba, cité religieuse et traditionnelle
Touba
est sans doute la localité qui compte le plus de lieux de prières en
Afrique pour un espace aussi réduit et aussi jeune. 560 mosquées ont été
décomptées de sources concordantes. Parmi cette pléthore de mosquées,
54 sont des « dioumas » (lieux pouvant abriter les prières du vendredi).
A l’heure de la prière, les appels des muezzins rivalisent d’ardeur.
Malgré le développement qu’elle a connu, Touba garde, jalousement,
certains traits traditionnels. C’est le cas, par exemple, des charrettes
qui occupent une place prépondérante dans le transport local. Plus de
16 000 véhicules hippomobiles sont recensées. L’histoire de ses
charrettes est strictement liée, selon des sources, au troisième Khalife
de Touba. Serigne Fallou Mbacké, en l’occurrence. Ce dernier est réputé
avoir attaché beaucoup d’importance aux détenteurs de véhicules
hippomobiles, les traitant souvent comme des rois. « Ces hommes qui
n’ont que ça pour nourrir leurs familles méritent respect, soutien et
admiration. Qu’on les laisse travailler tranquillement » aurait laissé
entendre le Saint-homme. Aujourd’hui, ces milliers de véhicules inondent
la cité en période de magal et causent, malheureusement, plusieurs
accidents.
Les hommes
A Touba, rien
n’est fait au hasard. La stratification humaine est bien claire et
strictement respectée. Il existe des talibés. Ils sont des hommes et des
femmes qui se sont octroyé la volonté de servir le Cheikh en tout temps
et intégralement. Ils vivent et font vivre le mouridisme. Juste
au-dessus d’eux, il y a les « serigne ». Ces derniers sont des
petits-fils de Cheikh Ahmadou Bamba ou encore des héritiers des anciens
compagnons du Cheikh. Ils veillent au respect des normes édictées par
l’Islam, tranche les différends, baptisent les nouveau-nés et prient
pour les morts. Celui qui trône sur tout ce beau monde est appelé «
Khalife Général ». Aujourd’hui, cet homme s’appelle Serigne Sidi
Mokhtar Mbacké. Il a succédé à ce rôle à Serigne Bara Mbacké. Le Khalife
est le seul souverain véritable. Il décide de tout. Ses paroles sont
appelées « ndigels ». Il dispose d’un porte-parole qui se charge de
temps en temps de parler à son nom. Ce travail incombe depuis plusieurs années à Serigne Bass Abdou Khadre
Mbacké. Touba fête le départ pour l’exil de son fondateur, le dimanche
22 décembre 2013.
Source: seneweb.com
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