Monsieur le ministre, vous vous
êtes permis, avec une phénoménale indélicatesse, de « tutoyer » Sérigne
Saliou Mbacké. Vos propos sont d’autant plus révoltants qu’ils
viennent de la part de quelqu’un qui est censé parler au nom de tout un
gouvernement, de surcroît un expert en communication.
Monsieur le
ministre, vous devez savoir, comme tout bon journaliste d’ailleurs
digne de sa profession, que le choix et l’utilisation des mots dans une
déclaration aussi importante que celle que vous avez faite, ne sont
point fortuits encore moins anodins.
Cher M. Abdou Latif Coulibaly,
nous avons entendu, il y a quelques jours avec stupéfaction, votre
déclaration à propos de l’affaire opposant l’homme d’affaires Aliko
Dangote et la famille de Serigne Saliou Mbacké. Il est clair qu’on ne
vous reproche pas, Monsieur le ministre, la prise de position dans
cette affaire en faveur de M. Dangote, car de toute évidence cette
décision est au-delà de votre domaine de compétence, mais la
responsabilité concernant le choix des mots ainsi que la manière de les
dire vous incombe entièrement.
Monsieur le ministre, vous devez
savoir, comme tout bon journaliste d’ailleurs digne de sa profession,
que le choix et l’utilisation des mots dans une déclaration aussi
importante que celle que vous avez faite, ne sont point fortuits encore
moins anodins. Libre à vous d’avoir des convictions propres qui
peuvent être complètement en déphasage avec la réalité au Sénégal (car
une des réalités au Sénégal est l’importance des familles religieuses).
Libre également à vous, M. Coulibaly, de ne pas donner de l’importance à
une telle ou telle autre famille religieuse, mais vous ne pourrez en
aucune manière vous octroyer le droit de manquer de respect à une
personne aussi symbolique et importante que Serigne Saliou Mbacké. Votre
indifférence manifeste à l’égard de certaines valeurs et règles non
écrites qui sont pourtant si chères aux Sénégalais, combinée avec votre
droit de vous s’exprimer librement ne vous dispense en rien de
l’obligation de respecter chaque personne pour ne pas dire une personne
de la dimension de Serigne Saliou.
Vos propos, Monsieur le ministre,
sont d’autant plus choquants et révoltants lorsque qu’on sait que vous
auriez utilisé cette petite mais non moins importante formule de
politesse à savoir « Monsieur », si vous vous adressiez à un dirigeant
occidental d’une part. Et d’autre part lorsqu’on sait que ces propos ne
vous auraient jamais frôlé l’esprit si Serigne Saliou était encore de
ce monde. Serait-ce de la calomnie avec une petite pointe d’hypocrisie ?
Monsieur Coulibaly, les Sénégalais ne manqueront pas de remarquer que
vos propos sont symptomatiques d’une certaine volonté de ravaler les
vrais chefs religieux hautement importants dans notre société au rang
de simples citoyens ordinaires. Mais ce projet en apparence maçonnique
n’aura jamais l’occasion d’aboutir. Certains chefs religieux ne peuvent
et ne pourront jamais être des citoyens ordinaires. Parler d’eux de
façon anodine et désinvolte n’y changera absolument rien. Les vrais
chefs religieux (j’insiste sur le mot vrai pour écarter tout amalgame)
constituent en quelque sorte des clés de voute permettant de maintenir
l’équilibre mais surtout la cohésion de notre si petite mais ô combien
complexe société sénégalaise avec ses nombreux clivages. Et à ce titre
ils méritent des prérogatives qui échappent aux citoyens ordinaires.
N’en déplaise à certains.
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